Communiqué de presse de la section régionale parisienne du Syndicat de la magistrature

Depuis une quinzaine de jours, les avocats se mobilisent contre un projet de réforme de l'aide juridictionnelle. Cette semaine, ce mouvement s'est considérablement amplifié : aux rassemblements et à la grève du « secteur assisté » ont succédé les motions appelant à la grève totale et les actions de blocage des juridictions. A Lille, Toulouse ou Boulogne-sur-Mer, ordre a été donné à la police d'évacuer par la force des avocats qui tentaient de barrer l'accès aux palais de justice pour se faire entendre. A ce jour, plus de 140 barreaux sur 164 sont en grève !

Face à la détermination des avocats et à l'efficacité de leurs actions, la garde des Sceaux a commencé à reculer : il n'y aura pas de prélèvement supplémentaire sur les CARPA – qui prennent déjà en charge l'administration de l'AJ et qui servent à payer la formation professionnelle des avocats, la prévoyance, etc. – mais il est toujours question d'abaisser le montant des UV dans certains ressorts et de réduire, parfois drastiquement, le nombre d'UV dans certains contentieux de masse (divorce, baux d'habitation, garde à vue...). La mobilisation se poursuit et pourrait encore s'accélérer.

Rappelons que selon le rapport 2014 de la Commission Européenne pour l'Efficacité de la Justice, le budget alloué à l'AJ par habitant est de 5,60 euros en France quand il est de 53,55 euros en Norvège, 33,69 euros en Ecosse, ou 28,79 euros en Hollande... Ces chiffres nous renvoient à la pénurie de l'institution judiciaire en France et à l'indigence des moyens qui lui sont alloués pour fonctionner dans des conditions dignes pour les professionnels et les justiciables.

Ce qui est en jeu, ce n'est pas la richesse – souvent fantasmée – des avocats, mais la possibilité pour les moins riches d'avoir une défense digne de ce nom. Ce qui se joue donc, ce n'est pas l'image que l'on aurait d'une profession ou qu'elle aurait d'elle-même, mais l'idée que l'on se fait de l'accès au droit et, par là, de ce que doit être le service public de la justice dans un Etat de droit. Ce combat n'est pas, ne doit pas être seulement celui des avocats. Nous sommes tous concernés, et l'ensemble des professionnels de la justice au premier chef.

C'est pourquoi la section régionale du Syndicat de la magistrature entend non seulement soutenir mais également prendre part à la mobilisation en cours, pour promouvoir l'égalité entre les justiciables et une justice à la hauteur de ses missions.

Elle appelle en conséquence l'ensemble des magistrats du ressort de la cour d'appel de Paris à se joindre aux avocats lors des actions de rassemblement et de blocage qui seront organisées dans les prochains jours, à renvoyer d'office les affaires ne présentant pas de véritable caractère d'urgence et, au-delà, à travailler à la constitution d'un mouvement plus vaste et coordonné, associant fonctionnaires, greffiers, avocats et magistrats, pour un service public de la justice respectueux de tous, justiciables comme professionnels, en vue d'actions fortes dans le cadre de journées « justice en danger ».

Unissons-nous pour avancer : avocats-fonctionnaires-magistrats, ne soyons pas bloqués, bloquons !
La section régionale parisienne du Syndicat de la magistrature
Paris, le 23 octobre 2015

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