Le Syndicat de la magistrature a été entendu le 16 septembre par le rapporteur du texte au Sénat sur le projet de loi relatif à la protection des enfantsqui a été voté en première lecture à l'Assemblée nationale début juillet. 

Nous avons repris nos critiques, déjà formulées devant l'Assemblée nationale, sur l'absence de débat sur les deux textes législatifs d’importance sur les enfants élaborés au cours de cette mandature - la réforme de l’ordonnance du 2 février 1945 et cette réforme se faisant toutes deux par la voie de la procédure accélérée - ainsi que le regret que le ministère de la Justice n'ait pas du tout été associé à la rédaction de ce texte, aucune présentation n'ayant d'ailleurs été faite en comité technique des services judiciaires.

Malgré cette problématique de méthode, nous nous étions efforcés de formuler des observations détaillées et concrètes devant la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. 

L'analyse du texte finalement voté en première lecture et soumis au Sénat a révélé qu'un certain nombre de nos arguments avaient été entendus par l'Assemblée nationale notamment : 
- L'accompagnement des personnes désignées tiers dignes de confiance par le service de l'ASE, notamment, en l'absence d'AEMO, 
La possibilité de recourir à l'ASE, notamment, pour le déroulement des droits de visite médiatisé des parents, en cas de placement chez un tiers digne de confiance, 
- L'élargissement des possibilités de contrat jeune majeur sans exigence de prise en charge sur une certaine durée avant majorité, 
- La consécration de l'existence des AEMO renforcées dans la loi,
- L'interdiction faite de procéder à une nouvelle évaluation de la minorité après une décision de juge des enfants de placement et d'orientation sur un autre département, 
- L'inscription du principe selon lequel la majorité ne saurait se déduire d'un refus de donner ses empreintes et d'une figuration au fichier AEM (appui à l'évaluation de la minorité)

Outre quelques amendements qui révèlent des contresens que nous avons signalés, certaines dispositions nous semblent en revanche toujours problématiques ou insuffisantes :  
- Le maintien du recours obligatoire au fichier "appui à l’évaluation de la minorité" (AEM) s'agissant des mineurs non accompagnés.  
-  L'exigence de collégialité avec présence de trois juges des enfants, ce que nous validons dans le principe mais qui nous semble difficilement réalisable dans la pratique - notre préférence allant vers d'autres magistrats accompagnant le juge des enfants, tels que des juges en charge du contentieux des affaires familiales ou des tutelles des mineurs ou encore des assesseurs de TPE, 
- L'absence d'avocat obligatoire pour le mineur en assistance éducative, a minima pour la première audience, même si une petite avancée existe avec l'inscription par l'Assemblée nationale de la possibilité pour le juge des enfants de demander d'office le désignation d'un avocat pour l'enfant auprès du bâtonnier,
- le maintien d'un élargissement du périmètre de la délégation d'autorité parentale ordonnée par le juge des enfants.

Plus généralement, nous déplorons que ce texte, qui modifie pourtant nombre de dispositions du code civil, du code de procédure civile, du code de l'action sociale et des familles ou encore du code de la sécurité sociale, n'ait pas été l'occasion d'élaborer un véritable code de l'enfance que le gouvernement s'était pourtant engagé à réaliser au cours des débats sur le code de la justice pénale des mineurs. Par ailleurs, l'essentiel des difficultés que rencontrent aujourd'hui les magistrats pour enfants et les services de protection de l'enfance tiennent à une insuffisance des moyens humains, financiers et matériels qui y sont consacrés. A cet égard, malgré la création d'un groupement d'intérêt public pour améliorer le pilotage de la protection de l'enfance, aucune mission de s'assurer de l'exécution des décisions de justice ne lui est dévolue. Sans évolution de ce côté, nombre des dispositions introduites par ce texte resteront lettre morte, comme c'est déjà le cas de plusieurs dispositions actuellement existantes.